Mission hiver 2022
Direction des Antiquités de Louqsor
M. Fathy Yassin Abd El-Karim Selim (directeur général de Louqsor et de la Haute-Égypte)
M. Baha Eddin Abdel Gaber (directeur des antiquités de Gournah)
M. Ezzedin El-Nouby Kamal (directeur-adjoint des antiquités de Gournah)
M. Ramadan Ahmed Ali (directeur du Bureau des Missions à Gournah).
M. Abdel Ghani Abdel Rahman (responsable de la zone centrale de la nécropole de Gournah).
Direction de la Mission archéologique franco-égyptienne
Dr. Christian Leblanc (directeur de la Mission archéologique française de Thèbes-Ouest/MAFTO-ASR-CNRS).
Dr. Hisham Elleithy (directeur général du CEDAE, Sous-Secrétaire d'État)
Inspecteurs Ramesseum
Khaled El-Tayeb Mohamed (inspecteur CSA, magasin Ramesseum)
Mohamed Abou Saoud (inspecteur CSA, fouilles)
Mina Gamal Milade (inspecteur CSA, fouilles)
Mohamed Mahmoud Ahmed Basri (inspecteur CSA, restauration)
Mahmoud Moussa Mohamed (inspecteur CSA, restauration)
Samah Nabil Mahmoud (inspectrice CEDAE)
Rabab Hamdi Ali (inspectrice CEDAE)
Wessam Saad Morsi (inspectrice CEDAE)
Ossama Bassiouni El-Damanhouri (inspecteur CEDAE)
Membres de la Mission
Christian Leblanc, égyptologue MAFTO ; Julian Sanchez, archéologue MAFTO ; Hélène Guichard, égyptologue, Musée du Louvre ; Victoria Asensi Amoros, archéologue-égyptologue MAFTO ; Anne-Hélène Perrot, égyptologue, Université de Munich ; Sameh Mohamed Zaki , égyptologue CEDAE ; Tommaso Quirino, archéologue, Superintendance Archéologie, Beaux-Arts et Paysages de Milan ; Flavio Ridolfi Riva, égyptologue ; Anna Consonni, égyptologue, Musée archéologique national de Florence ; André Macke, anthropologue, Université de Lille; Michèle Lhomme, anthropologue MAFTO ; France Jamen, égyptologue, Université de Lyon II ; Gwenaelle Le Borgne, égyptologue, Université de Montpellier 3 ; Jocelyne Hottier, documentaliste de fouille MAFTO ; Guy Lecuyot, architecte-archéologue MAFTO ; Jean-François Carlotti, architecte-archéologue, CNRS, Université de Lille; Éric Desèvre, tailleur de pierre ASR ; Sylvie Ozenne, restauratrice ASR ; Nalha Mohamed Saleh, archéologue et restauratrice ; Martina Terzoli, égyptologue ; Margherita Malvaso, anthropologue, Université de Milan; Pascal Pelletier, photographe, restitutions 3D, ASR ; Marie Grillot, photographe, ASR; Daniel Lefebvre du Prey, photographe, ASR ; Ossama Bassiouni El-Damanhouri, égyptologue CEDAE ; Wessam Saad Morsi, égyptologue CEDAE ; Rabab Hamdi Ali, égyptologue CEDAE ; Samah Nabil Mahmoud El-Sherbiny, égyptologue CEDAE ; Eraldo Livio, architecte-archéologue ASR.
Enseignant-chercheur
Dr. Mohamed Ahmed Ali Zienelabdein, Université de Louqsor.
LES SECTEURS D'ACTIVITÉ DANS LE TEMPLE ET DANS LES DÉPENCANCES
I. TEMPLE PROPREMENT DIT : LE BAS-CÔTÉ SUD (BCS-ZHS)
Équipe : Jean-François Carlotti, Guy Lecuyot, Éric Desèvre, Christian Leblanc.
Le travail qui a été entrepris sur le bas-côté sud du temple (secteur BCS-ZHS) devait permettre d'achever la restauration et la valorisation de cette partie du temple de pierre, que l'on ne connaissait que par ses fondations. Après la fouille archéologique de ce secteur conduite il y a quelques années par Jean-François Carlotti, il a été possible de faire réapparaître en élévation les structures en pierre disparues. Durant le temps de cette XXXIIIe campagne, l'objectif était de clore ce programme de restitution en faisant la jonction depuis le complexe osirien à l'ouest jusqu'au portique aux piliers osiriaques qui fermait la seconde cour à l'est. Confié à Eric Desèvre et à son équipe, il a été possible de mener à terme ce laborieux travail qui valorise aujourd'hui l'architecture du bas-côté sud du temple de Ramsès II, dont la lecture est désormais rendue beaucoup plus aisée pour les visiteurs.
Dans le même temps, le dallage en calcaire du portique sud-ouest aux piliers osiriaques, disparu depuis longtemps, a pu être partiellement restitué.
II. TEMPLE PROPREMENT DIT : LE SANCTUAIRE (ZSC)
Équipe : Guy Lecuyot, Éric Desèvre, Christian Leblanc.
Au programme de cette mission, il était prévu de mettre en oeuvre le projet de restitution des structures constituant le sanctuaire du Ramesseum. Nous avions pu constater, lors de la fouille archéologique de ce secteur, qu'il ne restait de cette partie du temple, que les tranchées de fondation. Donnant un plan en négatif, elles ont permis de réfléchir au choix qui serait donné de la restitution des murs du sanctuaire principal, des chapelles latérales et des complexes osirien (au sud) et solaire (au nord). Une réunion a pu se tenir sur le site avec les responsables de l'Inspectorat des Antiquités de Louqsor et le Service de la restauration de l'Inspectorat des Antiquités de Gournah, pour définir ensemble le choix des matériaux et le principe de restitution qui seraient retenus. Après un accord commun, le travail a pu se mettre en œuvre, et commencer par la restitution sur une assise de grès des murs fermant depuis l'ouest les complexes osirien et solaire et le mur latéral nord du temple proprement dit. Le projet sera surtout, dans un premier temps, de faire réapparaître le sanctuaire principal à quatre piliers, que précède une salle hypostyle (aujourd'hui entièrement disparue), les deux complexes (BCS et BCN) et le mur nord du temple (ci-dessous).
III. ALLÉE PROCESSIONNELLE SUD : "CAVALIER DE DÉBLAIS" (SECTEUR APS)
Équipe : Julian Sanchez, Gwenaelle Le Borgne, Jocelyne Hottier, Wessam Saad Morsi, Rabab Hamdi Ali, Samah Nabil Mahmoud El-Sherbiny.
La saison de fouille 2022 a vu disparaître en grande partie une nouvelle tranche du "cavalier de déblais" qui recouvre dans ce secteur l'allée processionnelle sud et le mur de clôture externe du Ramesseum. Là se trouvaient notamment des statues animalières identifiées l'an dernier pour être des sphinx androcéphales, bordant une voie dallée de calcaire dont un tronçon a déjà pu être dégagé.
Le "cavalier de déblais" sud est le plus important par rapport à ceux qui se trouvaient au nord ou à l'ouest, puisqu'il présente en surface une largeur de 14 m pour aller jusqu'à 29 m à sa base, sa forme en coupe étant trapézoïdale. Ce sont donc pas moins de 300 m3 qui ont été enlevés par couches successives entre janvier et février de cette année.
Ce travail a permis de retrouver de nombreux vestiges archéologiques appartenant à différentes périodes (plus particulièrement XVIIIe dynastie et époque ramesside). Des amulettes, mais aussi des objets à connotation rituelle ou cultuelle, des éléments de l'architecture du temple ou encore des témoins provenant des ateliers, des magasins ou du per-aankh (Maison de Vie) du Ramesseum ont été ainsi mis au jour pendant la fouille. On notera plus particulièrement des fragments de lits votifs hathoriques en terre cuite, dont le plus complet montre le dieu Bès et une jeune fille rameuse sur un bateau (2022.APS.032), du matériel de tisserands (bobines de différentes tailles 2022.APS.067, fusaïoles 2022.APS.068, outil pour affiner les fils de lin 2022.APS.078, poids en terre crue 2022.APS.082) des bouchons et des étiquettes de jarres à vin, des ostraca, certains étant des exercices scolaires s'inspirant de la Kemyt (2022.APS.008) ou encore de textes littéraires ou à caractère documentaire (2022.APS.011, 2022.APS.038, 2022.APS.048, 2022.APS.059, 2022.APS.071 et 2022.APS.077).
On signalera encore une originale amulette en calcaire (2022.APS.034), munie d’une bélière, représentant un singe jouant de la harpe, dont des exemples comparables ont été découverts dans des maisons de particuliers surtout à Tell el-Amarna. Ce type d’amulette est en lien avec Hathor et les femmes enceintes.
IV. ALLÉE PROCESSIONNELLE OUEST : TOMBE APO.CN21
Équipe : Hélène Guichard, Victoria Asensi Amoros, Anne-Hélène Perrot, Ossama Bassiouni El-Damanhouri, Rabab Hamdi Ali.
Après avoir complètement fouillé le corridor souterrain et le caveau de cette grande tombe qui semble pouvoir être datée du Moyen Empire, il restait à en retrouver, en surface, son entrée initiale, masquée par la voie processionnelle ouest mise en place par Ramsès II. Dans ce secteur également encombré par plusieurs chapelles funéraires de la Troisième Période Intermédiaire, il a été nécessaire, avec l'autorisation du Conseil Suprême des Antiquités, de démonter un mur de cette époque afin de pouvoir envisager une fouille plus systématique qui a donc été entreprise durant cette campagne.
L'enlèvement des déblais a permis dans un premier temps de mieux comprendre à partir de la stratigraphie du remplissage, les étapes qui avaient progressivement été à l'origine de la disparition de l'entrée de la sépulture APO.CN21. Si la fouille a pu permettre déjà de retrouver l'un des angles du corridor d'accès antique, taillé dans le piémont de la montagne, elle a mis en évidence également des vestiges funéraires et notamment un cercueil rectangulaire d'enfant, en bois peint, qui a été placé dans la réserve du site, en attendant de pouvoir être ouvert et étudié. Cette saison a été également mise à profit pour constituer le catalogue de la poterie trouvée dans la tombe et dans son environnement immédiat.
V. DÉPENDANCES NORD : SECTEUR STG
Équipe : Tommaso Quirino, Flavio Ridolfi Riva, Anna Consonni, Margherita Malvaso, Ossama Bassiouni El-Damanhouri, Rabab Hamdi Ali.
La campagne a été consacrée à la fouille d'une tombe dont l'entrée a été identifiée en 2019 à l'intérieur du mur qui sépare le secteur STL du secteur STG (STG.CD.To1), et à la finalisation de du dégagement de la tombe STG.SA14.To1. La fouille des niveaux en correspondance avec une structure composée de plusieurs salles, peut-être une chapelle funéraire de la Troisième Période Intermédiaire, située dans l'angle sud-est de STG.CR a également été entreprise. A l'intérieur de la plus grande salle de cette structure, l'entrée d'un nouveau puits funéraire, STG.CR.To01, a été identifiée. Le déblaiement de ce puits a été engagé au cours de cette mission mais n'a pu être terminé.
STG.SA14.To1
La fouille de la tombe s'est poursuivie là où elle a été laissée à la fin de 2019, lorsque les traces de deux cercueils, deux vases coniques intacts (2019.STG.044, 2019.STG.045, transférés aux entrepôts du MoA à la Carter House) et deux boîtes d'oushebtis (2019.STG.043, 2019.STG.044, également transférées dans les entrepôts du MoA à la Carter House) avaient été découvertes. La chambre funéraire, située à environ 6 m de profondeur, est coupée au nord et mesure environ 3,00 m x 2,30 m, avec une hauteur maximale de 2,80 m. À l'intérieur de la chambre, deux autres boîtes d'oushebtis sont apparues au pied des deux cercueils. Bien que le bois des cercueils n'ait pas été conservé en raison de l'humidité considérable qui caractérisait le lieu les oushebtis étaient concentrés dans une zone rectangulaire et bien délimitée : la première boîte, située au pied du cercueil ouest, avait une taille de 14 x 28-30 cm et contenait 190 oushabtis (plus 8 fragments) en faïence vert-bleu (2022.STG.005), dont 168 momiformes et 22 raïs ou dizainiers ; la deuxième boîte, située au pied du cercueil oriental, avait une dimension de 12 x 28-30 cm et contenait 191 oushabtis en faïence bleue (2022.STG.006), dont 172 momiformes et 19 raïs/dizainiers. Certains des oushabtis de la deuxième boîte portaient le nom du défunt estampillé au dos. Du point de vue chronologique, il se confirme que la typologie des vases et des oushebtis permet de dater la tombe de façon préliminaire à une phase de transition située entre la 25ème et la 26ème dynastie.
STG.CD.To1, STG.CD.To2
La tombe STG.CD.To1 se présente sous l'aspect d'une fosse rectangulaire très irrégulière, avec une ouverture d'environ 1,90 m x1,60 m octroyée à partir de la ruine du grand mur qui sépare le secteur STL du secteur STG. La chambre funéraire, coupée au nord sur une profondeur d'au moins 5,50 m, a une forme quadrangulaire irrégulière, avec une taille de 4,30 m x 3,50 m et une hauteur maximale d'environ 2,25 m. La principale caractéristique de cette tombe est qu'elle n'avait pas un seul accès au caveau, mais deux : une fois le caveau atteint, en effet, il était possible de reconnaître le cône de remplissage d'un deuxième puits qui n'avait pas encore été identifié en surface, maintenant appelée STG.CD.To2. Il est possible que, lorsque l'un des deux puits a été creusé dans le passé, soit la position du précédent, soit la position de la chambre n'était pas connue. Ainsi, lorsque ceux qui ont creusé le deuxième puits ont atteint la chambre du premier, ils ont décidé de ne pas creuser une nouvelle chambre mais de réutiliser celle déjà à leur disposition. La stratigraphie de la chambre confirme cette hypothèse, puisque deux niveaux de dépôts différents ont été trouvés.
Le remplissage des deux puits était assez similaire dans leur composition : en effet, une grande quantité de fragments de poterie appartenant à des vases datant de la période ptolémaïque, dans certains cas partiellement reconstructibles, ainsi qu'une énorme quantité d'ossements humains et animaux ont été retrouvées. Au pied du puits To1, dans la partie supérieure du remplissage de la chambre, la présence des restes presque complets d'un bovidé en connexion anatomique était particulièrement remarquable. Malheureusement, les ossements d'animaux et d'humains étaient dans un mauvais état de conservation, probablement en raison du contexte humide que nous avons pu observer. À l'intérieur de la chambre funéraire, comme déjà dit plus haut, deux phases différentes d'occupations ont été trouvées : la première et la plus récente comprenait les traces de trois sépultures (SK1-3) dont deux constituaient un ensemble d'au moins deux cercueils, un externe avec une forme rectangulaire et un interne de forme anthropoïde. Associées à ces sépultures, les traces de trois boîtes d'oushabtis (2022.STG.062, 2022.STG.064, 2022.STG.070), de deux scarabées (en terre cuite, 2022.STG.041, et en grès, 2022. STG.057) et trois concentrations différentes de perles tubulaires et circulaires en faïence de différentes couleurs (2022.STG.060, 2022.STG.061, 2022.STG.068). Dispersés dans le sédiment de ce niveau se trouvaient également deux yeux en bronze (2022.STG.054, 2022.STG.055) avec une pupille en coquillage, dont un avec sourcil, pour la décoration d'un ou deux cercueils. La tombe, d'après les objets trouvés et la forme probable des cercueils, remonte à la XXVème dynastie.
STG.CR
Cette structure, qui occupe une grande surface libre du secteur STG, appelée STG.CR, disposait à l'origine d'un accès délimité par deux murs. Ce dernier se composait alors d'une grande cour et de trois pièces de petites dimensions plus ou moins égales. La fouille des niveaux de surface dans les pièces a permis d'identifier, dans la cour, l'entrée d'un puits funéraire, STG.CR.To1, et dans les trois petites salles, un sol en limon compact (dakka). Seuls le sol de la salle la plus à l'est, recouvert d'un effondrement de briques, et celui de la salle centrale ont été fouillés, mais aucun matériau permettant de donner une interprétation plus précise de la fonction de cette structure n'a été trouvé. En fait, sa forme rappelle celle d'une chapelle funéraire de la Troisième Période Intermédiaire.
STG.CR.To1
La tombe STG.CR.To1 est un puits funéraire rectangulaire, avec une ouverture d'environ 1,30 m x 1,05 m et une profondeur de près de 5 m. Il a un seul caveau orienté vers l'ouest, de forme rectangulaire irrégulière, avec des angles arrondis et des parois légèrement concaves, d'environ 3,00 m x 2,30 m. Tant dans le remplissage du puits que dans une grande partie de celui du caveau, plus compact et limoneux sur le fond, aucun élément dans sa position d'origine n'a été retrouvé mais seulement quelques tessons épars. À noter, à la profondeur de 1,50 m à l'intérieur du puits, la découverte d'un seul vestige : il s'agit d'un bloc de grès avec un signe dessiné à la peinture rouge, correspondant certainement à une "marque de carrier" (2022.STG.075). Très probablement, la tombe a déjà été identifiée et fouillée par des archéologues à la fin du XIXe-début du XXe siècle. Une étude plus approfondie de la typologie des amulettes nous aidera à mieux définir la chronologie de ce contexte remontant à la Troisième Période Intermédiaire.
Travaux de conservation :
À la fin de la mission, la tombe STG.SA14.To1 a été à nouveau comblée, tandis que les deux autres encore en fouille, STG.CR.To1 et STG.CD.To1-To2, ont été refermées en surface respectivement avec une grille en fer et avec des tôles. Enfin, à la suite des salles en STG déjà explorées et documentées au cours des dernières campagnes, la restauration des murs en brique crue a pu être assurée : en particulier, le grand mur US 14, qui sépare le secteur STL du secteur STG (STL.ES02 de STG.SA10), et le mur US 83, qui sépare STG.SA10 de STG.SA11.
VI. DÉPENDANCES NORD-OUEST : SECTEUR STI.SA06
Équipe: Christian Leblanc, Sameh Mohamed Zaki, France Jamen.
L'état du mur ouest de la salle SA06 étant très dégradé, nous avons mis au programme sa restauration. Ce travail a nécessité de descendre jusqu'aux fondations afin de pouvoir le reconstruire plus sainement. C'est au cours de ce travail, qu'ont été découvertes une abaque aux cartouches de Ramsès II (provenant certainement de l'architecture de la salle à colonnes du Trésor-annexe) et une sépulture murale datant de la Troisième Période Intermédiaire, composée de trois inhumations dont les vestiges de cercueils étaient encore in situ avec leurs boîtes à oushebtis (2022.STI.041) entièrement dévorées par les termites. Un ensemble d'ossements humains se trouvait également dans ce contexte, ainsi que des éléments de résilles funéraires en perles (2022.STI.030), plusieurs beaux fragments de cartonnages, dont l'un, de grand format, montre le dieu Thot ibiocéphale faisant face à Rê-Horakhty dont l'image n'est que très partiellement conservée (2022.STI.034). Les restes humains ont été confiés pour étude aux anthropologues et un relevé orthophotographique a été réalisé avant que la restauration du mur ne recouvre définitivement le contexte de la fouille.
La salle STI.SA06 étant encore en grande partie remplie de déblais, nous avons pu mettre une équipe d'ouvriers pour en entreprendre son nettoyage systématique. À cette occasion de nouveaux fragments d'oushebtis au nom de Pashedkhonsou ont été retrouvés et enregistrés.
VII. DÉPENDANCES NORD-OUEST : SECTEUR STI.TR/TOMBE DE SEHETEPIBRÊ (To01)
Équipe: Christian Leblanc, Sameh Mohamed Zaki, France Jamen, Anne-Hélène Perrot, Rabab Hamdi Ali, Sylvie Ozenne.
Lors de la dernière campagne archéologique dans le secteur des dépendances nord-ouest (STI-TR) du Ramesseum (XXXIIe campagne, 2021), nous avions pu dégager l'intégralité de la structure souterraine de la tombe de Sehetepibrê, à savoir le corridor et la salle terminale. Les résultats de ce travail avaient été consignés dans un article publié dans le volume XXXI des Memnonia, lequel donnait donc un descriptif de cette sépulture depuis le début de la descenderie décorée de scènes peintes, jusqu'au fond du corridor souterrain, là où sur le côté nord, s'ouvrait un très large et profond puits encore encombré de déblais.
Cette année, notre travail a consisté à déblayer d'abord les deux anfractuosités ou cavités qui avaient pu être identifiées l'an dernier dans les parois nord et sud du corridor souterrain, puis à vider le puits situé dans la salle terminale pour atteindre le caveau où avait été inhumé Sehetepibrê, un personnage encore bien énigmatique connu jusqu'à présent exclusivement par son nom.
Les cavités nord et sud du corridor souterrain
La cavité nord. Profondeur 0,95 m avec une ouverture large de 1,20 m. L'entrée en avait été bloquée par un muret de briques crues, dont la hauteur conservée est de 1,10 m. Module des briques 32 x 14 x 8 cm.
À l'intérieur de la cavité, reposaient deux crânes humains placés côte à côte, sans aucun autre vestige. Ces crânes avaient été visiblement mis à l'abri avant la fermeture de la cavité.
La cavité sud. Profondeur 2,30 m avec une ouverture large de 1,50 m. Une arase de briques crues, longue de 1,45 m et large de 0,30 m, est conservée à l'entrée sur une hauteur de 0,14 m, indiquant que cette anfractuosité avait été condamnée à un moment donné. À l'intérieur, sa largeur maximun est de 2,10 m sur une hauteur sous plafond de 1,00 m. En plus d'ossements humains prélevés par les anthropologues en vue d'être examinés, plusieurs autres vestiges ont été retrouvés dans cette cavité : un couvercle en brèche ayant appartenu à un petit récipient, un ostracon hiératique, quelques petits oushebtis en terre cuite badigeonnée de blanc, momiformes et anépigraphes, d'autres aux noms de Shedmontouemhat, de Panakhtimen, du père divin d'Amon, aAnkhefmaât, dont de très nombreux exemplaires avaient aussi été dispersés à l'entrée de cette cavité et même dans tout le corridor. Plusieurs fragments de cartonnages et de cercueils en bois figuraient encore parmi le matériel archéologique qui fut extrait des lieux.
Le puits et les caveaux de la tombe de Sehetepibrê
Le puits. Il est taillé dans le calcaire du piémont de la montagne thébaine. Profond de 3,50 m/3,75 m, il est plus long et large au fond qu'à son ouverture, épousant ainsi, en coupe, la forme d'un trapèze. Au fond, il donne accès à deux caveaux: le premier (caveau I), creusé en direction de l'ouest ; le deuxième (caveau II), en direction du nord-est.
Le caveau I, particulièrement soigné, est semble-t-il, celui qui avait été aménagé pour recevoir la dépouille de Sehetepibrê. On y accède par une porte large de 1,15 m et haute de 1,20 m. Le caveau lui-même est large de 2,00 m et profond de 2,60 m (côté nord) et de 2,00 m (côté sud). Sa hauteur ne dépasse pas 1,00 m. Il s'agit donc d'un petit caveau, mais dont l'espace suffisait à y entreposer un cercueil et quelques éléments de mobilier funéraire. Par son orientation, il prolonge la structure souterraine un peu plus vers l'ouest pour aboutir sous la salle STI.SA09.
Le caveau II se présente comme une adjonction, creusée avec moins de soin que le premier caveau. On y pénètre par une simple ouverture, large de 1,25 m, qui donne sur une salle grosso modo rectangulaire, large de 1,40 m (côté ouest) et de 1,20 m (côté est), profonde de 2,30 m et haute de 1,15 m en son centre. Lors du creusement de ce caveau, un accident est visiblement survenu, car la paroi gauche présente une échancrure large de 0,85 m qui donne sur une tombe mitoyenne (sépulture STI.TR.To02), datée par son matériel archéologique, du Moyen Empire. À l'origine, cette ouverture fortuite, haute de 0,70m, avait été colmatée par un épais enduit de plâtre, dont des traces subsistent encore in situ contre la paroi. Une telle constatation laisse dès lors supposer que le caveau II ne fut creusé que postérieurement au caveau I dans lequel, on l'a dit, avait été inhumé Sehetepibrê au Moyen Empire.
La sépulture STI.TR.To02. On y accède aujourd'hui par le caveau II de la tombe de Sehetepibrê. Son accès initial, depuis un puits vertical creusé dans un environnement proche, est encore bloqué par un mur de briques crues (haut. 1,20,m x largeur 1,17 m), qu'il conviendra de vider lors de notre prochaine campagne archéologique. Durant cette saison, le caveau de cette tombe, orienté Est-Ouest (prof. 3,05 m x larg. max. 1,45 m x haut. 1,30 m) a surtout livré un matériel datant du Moyen Empire (miroir de cuivre 2022.STI.120, rames 2022.STI.110, rameurs et cabine ayant appartenu à un modèle de bateau en bois 2022.STI.116-120, abondante poterie dont les formes sont en cours de resconstitution). Les restes humains retrouvés dans le caveau ont été étudiés par les anthropologues de la Mission.
Cette année encore, le dégagement qui a été entrepris dans le puits et les caveaux I et II de la tombe de Sehetepibrê, a permis de rassembler un abondant matériel archéologique constitué pour l'essentiel d'oushebtis aux noms de plusieurs personnages, d'une grande quantité de fragments de cercueils et de cartonnages (classés et en cours d'étude par France Jamen : cf. infra), de très nombreux tessons de poteries aux formes diverses, de nombreux bouchons de jarres (notamment d'huile d'olive et de miel), de petits couvercles de récipients en brèche ou albâtre et d'éléments de bateaux en bois provenant plus spécifiquement d'un équipement funéraire du Moyen Empire, comme aussi cette poupée ou "paddle doll" en bois peint, sans bras et acéphale (2022.STI.069) trouvée dans le caveau I de la tombe. La poterie, dont plusieurs formes sont en cours de reconstitution, semble pouvoir être datée des XIIe et XIIIe dynastie, voire pour certaines du Nouvel Empire (XVIIIe dynastie). Tous les restes humains exhumés du puits et des caveaux ont été rassemblés et étudiés par les anthropologues (cf. leurs premiers résultats : infra § VIII). On notera encore que la présence de cinq squelettes de chiens trouvés au sol du puits et du caveau I, suggère que ces animaux ont chuté accidentellement dans la sépulture à une date apparemment très ancienne. Ne pouvant en ressortir en raison de la profondeur du puits, ils y sont morts sur place.
Concernant les fragments de cartonnages et de cercueils de la Troisième Période Intermédiaire recueillis dans la tombe de Sehetepibrê, l'étude préliminaire entreprise par France Jamen durant cette campagne, semble indiquer que ce matériel funéraire remonterait aux XXIe-XXIIe dynasties, mais également plus tard (XXVe-XXVIe dynasties).
VIII. TRAVAUX ANTHROPOLOGIQUES
Équipe: André Macke, Michèle Lhomme.
Comptabilité des ossements humains provenant du secteur STI-TR (tombe de Sehetepibrê)
L’étude des restes osseux confirme l’extrême destruction des corps réduits à l’état de squelette dans l’ensemble des structures de la tombe. Le pillage s’est accompagné de rejets dans toute la tombe rendant difficile un comptage précis et surtout l’acharnement destructeur a fragmenté en de multiples morceaux la majorité des os.
On note l’absence significative de traces de momification si ce n’est un corps momifié de type tardif à l’entrée de la tombe. Aucun des os ne porte de traces de momification et en particulier il n’y a pas eu d'excérébration sur les crânes étudiés.
La comptabilité peut s’effectuer en tenant compte de l’os le plus retrouvé par secteur ou celui le plus présent dans l’ensemble de la tombe (sans tenir compte des secteurs de subdivision) ce qui supposerait une dispersion des éléments de squelette.
Tableau 1. Total minimal par secteur sans dispersion
En tenant compte d'une marge d’erreur de 10, la population inhumée dans l’ensemble de la tombe peut être estimée dans une fourchette minimale relative entre 53 et 64 adultes (63 adultes si l'on ne compte pas la tombe STI.To02) et entre 38 et 43 enfants.
Durant cette mission les anthropologues ont pu également examiner les restes humains provenant des tombes du secteur STG (STG.SA14To01 , STG.SA11To01), du secteur STI (mur ouest de la salle STI.SA06) et du secteur APO (APO.CN021).
IX. TRAVAUX DE RELEVÉS ARCHITECTURAUX
Responsable : Eraldo Livio.
Durant cette campagne archéologique, les vestiges de la sépulture murale mise au jour dans le mur ouest de la salle STI.SA06 (To03) ont pu faire l'objet d'un relevé archéologique et architectural. Eraldo Livio a pu également établir un relevé complet (plan et sections) de la sépulture de Sehetepibrê (STI.TR.To01) après le dégagement des cavités nord et sud du corridor souterrain, du puits et des deux caveaux.
X. TRAVAUX D'ÉTUDE DU MATÉRIEL ARCHÉOLOGIQUE
Responsable : Guy Lecuyot.
Plusieurs éléments en grès appartenant à l'architecture du temple ont pu être identifiés. Il s'agit de claustras et de fragments provenant notamment de fenêtres et de la toiture du Ramesseum. Certains sont en vrai relief (ou bas-relief) et portent seulement le nom de couronnement de Ramsès II dans sa première version (Ousermaâtrê) suggérant que ces éléments devaient prendre place dans le sanctuaire, car seule cette partie semble avoir été traitée selon cette technique. D'autres, en relief dans le creux pourraient provenir de murs-bahuts ou encore du palais royal dans lequel un claustra orné de cartouches avait été découvert lors de son exploration.
Un catalogue mis au point durant cette mission, renfermera tous ces fragments et sera publié dans l'un des prochains volumes de Memnonia.
XI. MAGASIN DU SITE
Equipe : Sylvie Ozenne, Nahla Mohamed Saleh, Moshira Gaber Abdel Razek (stagiaire en restauration pour une période de un mois) ; Khaled El-Tayeb Mohamed.
Au cours de cette campagne, le traitement et le conditionnement des objets de fouille ont porté sur plusieurs secteurs : WAD (secteur de la chapelle de Ouadjmès) 1994 ; ZSC (secteur des sanctuaires) 1999-2002 ; STF (secteur des ateliers) 2006-2016 (reste à faire 2017-2018) ; STI (secteur nord-ouest des dépendances) fragments de cercueils et de cartonnages.
Parallèlement à ce travail et comme chaque année, nous avons assuré la conservation ou/et restauration des objets de fouilles à la demande des archéologues du site.
En dehors du programme officiel, les inspecteurs restaurateurs de l'Inspectorat des Antiquités de Gournah nous ont sollicité pour débuter la conservation des peintures de la tombe de Sehetepibrê (STI Tr), intervention complexe en raison du peu de temps dont nous disposions.
Cette opération sera mise en œuvre après la couverture en voûte de la descenderie, programée à la prochaine mission.
La dernière semaine de février a été consacrée aux relevés d’altérations de la tombe de Paser (TT369) en collaboration avec le CEDAE.
Plusieurs objets de fouille ont quitté le magasin du Ramesseum cette année, pour rejoindre le grand magasin Carter du Conseil Suprême des Antiquités : 2005.APS.013 (ostraca) = SCA 99a ; 2012.APS.047 (poids) = SCA 101 ; 2012.APS.066 (poids) = SCA 101 ; 2019.APS.002 (ostracon) = SCA 103 ; 2019.APS.010 (ostracon) = SCA 103 ; 2019.APS.013 (ostracon) = SCA 103; 2019.APS.066 (ostracon) = SCA 99b ; 2019.APS.075 (ostracon) = SCA 103 ; 2003.STO.057 (moules) = SCA 100 ; 2009.STF.002 (ostracon) = SCA 98 ; 2007.STF. 002, 005,-008, 011-012, 019, 022-025, 030, 032, 046,-048 (ostraca) = SCA 98 ; 2009.STF.014, 027, 031, 039, 043, 047-048, 054, 066, 069, 073, 102, 106, 113, 129 (ostraca) = SCA 102 ; 2018.STG.060 (terre cuite) = SCA 97 ; 2019.STG.016 (amulette) = SCA 100 ; 2019.STG.019 (amulette) = SCA 100 ; 2019.STG.042 (oushebtis) = SCA 103 ; 2019.STG.043 (oushebtis) = SCA103 ; 2019.STG.044 (terre cuite) = SCA 96 ; 2022.STG.005 (oushebtis) = SCA 103 ; 2022.STG.006 (oushebtis) = SCA 103.
XII. TRAVAUX PHOTOGRAPHIQUES
Equipe : Pascal Pelletier, Marie Grillot, Daniel Lefebvre du Prey.
Comme les missions précédentes, une couverture photographique des différents chantiers en activité a pu être rassemblée. De même, les différents secteurs ont fait l'objet d'archives documentaires filmées afin de montrer, d'une année sur l'autre, l'évolution des recherches et des travaux de restauration menés dans le temple et ses dépendances. Une documentation en 3D et en orthophotographie a été également réalisée.
Christian LEBLANC
Directeur de la Mission Archéologique de Thèbes-Ouest.
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